Insolites gaz de serre

De mieux en mieux connus pour leurs rôles dans le réchauffement de l’atmosphère terrestre, les gaz à effet de serre le sont moins pour leurs influences persistantes au sein d’espaces parfois inattendus.

Ainsi, entre l’an 850 et l’an 1850, l’humanité a diminué le couvert végétal planétaire afin de pouvoir utiliser de nouvelles terres agricoles, provoquant une émission massive de co2 issue de ces défrichements.

Aujourd’hui encore, 9 % des actuelles hausses des températures sont dues à l’action du co2 alors émis.

Aujourd’hui encore, 30 % des gaz de serre actuellement dans l’atmosphère sont le fruit des déboisements intervenus au cours de cette même période dans les seules Chine et Inde.

Entre 200 et 2000 kms au-dessus de la planète, l’influence des gaz de serre n’est pas non plus négligeable.

A certaines de ces altitudes, il n’est pas rare d’y trouver une concentration de co2 progressant de 10 ppm/décennie (ppm : parties par million, c’est-à-dire 1 gramme de co2 pour 1 tonne d’air atmosphérique).

Ces concentrations ont pour effet de diminuer la densité atmosphérique de ces espaces (entre 3 et 5 % / décennie selon les altitudes), d’autant plus que l’atmosphère s’amincit à ces hauteurs.

Cette baisse de densité atmosphérique favorise une longévité accrue (+25 %) des débris spatiaux, augmentant ainsi leurs collisions avec des engins en activité (satellites, télescope Hubble, etc…).

Sur notre bonne vieille terre, les espaces intérieurs de bâtiments peuvent concentrer jusqu’à 2500 ppm de co2 (contre 400 dans l’atmosphère en 2012), ce qui entraîne une altération de la cognition des personnes s’y trouvant, notamment celles d’enfants et adolescents passant plusieurs heures dans des salles de classe insuffisamment aérées.

Même des adultes peuvent être impactés par une telle concentration de co2 : une expérience, menée dans une pièce où 2500 ppm de co2 y étaient concentrées, a révélé une diminution de leurs capacités de prises de décisions dans 7 des 9 tests subis par 22 personnes.

Les pelouses urbaines ne sont pas en reste : la chaleur supplémentaire qu’emmagasinent leurs sols du fait du réchauffement global a pour conséquence d’augmenter la nécessité de respirer des micro-organismes y résidant.

Leurs expirations plus nombreuses provoquent davantage de co2 rejoignant l’atmosphère, faisant des pelouses résidentielles des pourvoyeurs en gaz de serre plus abondants que, par exemple, les cultures de maïs.

Durabilité et incongruité : les gaz de serre n’ont pas fini d’être étonnants.

 

Sources :

- Residential lawns efflux more carbon dioxide than corn fields, traduit en Français sur Physorg.com, 23.04.2013.

- Scientists detect carbon dioxide accumulation at the edge of the space, Phys.,11.11.2012

- High co2 levels indoors impair cognition, traduit en Français sur Treehugger.com, 17.10.2012.

- Pre-industrial emissions still causing temperatures to rise, Phys., 03.07.2012.

- Changing atmosphere increases build-up of space debris, Phys., 23.06.2010.

- Climate change affecting earth’s outermost atmosphere, Phys., 11.12.2006.

- Rising carbon dioxide levels increase risks to satellites, Phys., 19.04.2005.

Produits et comportements “verts”(4) : vaines imitations

Les imitations artificielles de la nature sont souvent perçues comme des réponses écologiques aux problèmes environnementaux déclenchés par l’espèce humaine.

Pris parmi de nombreux autres, les exemples ci-dessous montrent pourtant des résultats contraires et des impacts environnementaux résultant de telles pratiques.

La recherche de la blancheur immaculée fait partie de cet arsenal.

En effet, plus une surface planétaire est claire, plus le rayonnement solaire est renvoyé vers l’espace, diminuant ainsi l’apport radiatif du soleil et contribuant à ce que les températures atmosphériques n’augmentent pas davantage.

L’albédo, c’est le nom donné à ce mécanisme naturel, fait que, par exemple, les espaces glacés renvoient au moins 80% du rayonnement solaire.

Fort de ce constat, l’idée de peindre en blanc les glaciers déglacés par le réchauffement global s’est fait jour, avec une peinture à base de chaux présentée comme respectueuse de  l’environnement .

Hélas ! La production d’une tonne de chaux, quel qu’en soit le type, génère en moyenne l’émission de 731 kgs de co2, ce qui fait qu’un meilleur renvoi du rayonnement solaire s’accompagnerait d’une hausse significative des gaz de serre dans l’atmosphère .

Au surplus, cette blancheur artificiellement créée entraîne une diminution des précipitations neigeuses et mène donc à un moindre réenglacement naturel des glaciers ainsi peints.

Voilà du bel ouvrage écologique.

Le réchauffement global est issu à 79 % de l’émission de 48 sortes de gaz de serre, à 18 % de la production de noir de carbone (suies), et à 3 % des villes (bitume, bâtiments, béton ,… ).

Faute de s’attaquer aux 97 % de ses causes, ce qui supposerait une réduction drastique des activités professionnelles et des consommations, se préoccuper des 3 % restants paraît plus aisé.

C’est pourquoi des toits blancs sont préconisés dans les agglomérations urbaines planétaires.

Cependant, cette blancheur artificielle accroît la stabilité de l’air et réduit ainsi le transport vertical de l’humidité et de l’énergie nécessaires à la formation de nuages.

Cela se traduit par une baisse des précipitations (par exemple de 12 % en Arizona), cette moindre nébulosité aboutissant aussi au fait que davantage de lumière solaire atteint les villes, en augmentant alors les températures qui y règnent.

Même déboire avec les revêtements refroidissant artificiellement les chaussées urbaines : en été, 40 % de plus de rayonnement solaire sont enregistrés dans les villes Californiennes dotées de tels équipements, en accroissant les températures de 0,8° en moyenne.

Les résultats seraient très différents si les 97 % des causes du réchauffement étaient fortement réduites : le réenglacement massif de la banquise Arctique, du Groenland, des 200 000 glaciers planétaires, etc… permettrait de renvoyer au moins 80 % du rayonnement solaire.

Efficacité des mécanismes naturels, inefficience de leurs pâles copies que sont les technologies humaines .

Les restaurations des zones humides mondiales (lagunes, tourbières, estuaires, marais salants, ripisylves, etc…) constituent un autre bon exemple de pathétisme humain.

621 restaurations de ces types d’écosystèmes ont été récemment évaluées.

Les résultats sont sans ambiguïté aucune :

-  la biodiversité animale et végétale obtenue est bien moindre que dans les zones humides sauvages :

-  26 %d’espèces végétales en moins,

-  disparition de coléoptères aquatiques par une réhydratation artificielle  trop rapide (tourbières…),

-  utilisation d’anciennes terres agricoles, impropres car manquant de déclivités naturelles (marais salants…).

Etc…

- 23 % de co2 stocké en moins dans ces espaces artificiellement reconstitués.

- 5 % du phosphore retenus (60 % dans les zones humides naturelles).

Etc…

Même de longues durées de ces restaurations ne modifient pas ces constats, par exemple aux Etats-Unis où de telles opérations sont menées depuis 100 ans sur plusieurs sites.

En ce sens, la « compensation » qu’est la création d’une zone humide en échange de la construction de l’aéroport de Notre-Dame des Landes apparait d’une redoutable pertinence…

Par ailleurs, ces reconstitutions artificielles n’ont pas non plus empêché le nombre de zones humides mondiales de diminuer de 50 % depuis 1900.

Laisser faire la nature et ne pas intervenir intempestivement permettrait aux milieux naturels de résoudre la plupart des actuels problèmes environnementaux : mais encore faudrait-il que les écosystèmes sauvages disposassent de suffisamment de place pour exprimer leurs talents.

Ainsi, 45 % de la population mondiale vit à moins de 100 kms des linéaires côtiers planétaires, entraînant avec elle l’apparition d’infrastructures permanentes : nombreuses constructions en front de mer, routes d’accès, jetées, digues, ports de plaisance, espaces récréatifs,…

Tout cela a eu pour conséquences la disparition concomitante de nombre d’écosystèmes côtiers (herbiers sous-marins, récifs coraliens, dunes, arbres maritimes, îles-barrières, …) pourtant propres à endiguer montées des mers et océans, érosion, polluants, accroissements des violences des tempêtes…

La multiplication des bactéries fécales (coliformes) due à cette présence humaine bien trop concentrée fait partie des conséquences affectant les littoraux mondiaux, car plus recyclées par des milieux naturels désormais trop souvent absents (notamment, mais pas seulement, les vasières des estuaires).

Dans le but de remplacer ces écosystèmes en tentant des les imiter, des filtres sont installés sous des dunes (souvent artificielles elles-aussi) afin d’éliminer cette abondance de bactéries fécales : en dehors des égouts, ce sont en effet les littoraux planétaires qui en concentrent le plus : ah ! Respirer le bon air marin…

Ainsi, force nylon et polychlorure de vinyle sont-ils utilisés dans les chambres de filtration : confier à ces dérivés du pétrole le soin de neutraliser ces indésirables coliformes à la place de milieux naturels idoines est très révélateur de l’inappropriation de bon nombre d’attitudes humaines.

Un pas supplémentaire est franchi lorsque des forçages de comportements naturels sont menés au nom d’une écologie mal comprise.

Témoins les ponts pour chauves-souris.

Autrefois, les haies guidaient ces petits mammifères dans leurs déplacements, mais l’exubérance irrationnelle des routes et autoroutes en a fait disparaître beaucoup.

C’est pourquoi des ponts ont été installés afin d’éviter les collisions entre chauves- souris et véhicules en incitant les premières à voler au-dessus des seconds.

Mais deux bonnes raisons s’opposent à cette irréaliste volonté humaine : leurs proies se trouvent souvent près du sol, et voler bas les protègent de leurs prédateurs naturels qui ont davantage de difficulté à les attraper à cette faible hauteur : les chauves-souris préfèrent alors risquer des collisions en ne modifiant pas leurs comportements.

Planter des arbres partout est également une marotte humaine.

Depuis environ 300 millions d’années qu’ils existent, les arbres ne se sont jamais installés dans les steppes, pressentant qu’ils auraient beaucoup de mal à s’y maintenir et reproduire.

Mais l’espèce humaine se fait fort de réparer cette erreur.

En Turquie, en Anatolie centrale, de telles plantations intempestives fragilisent l’écosystème steppique qu’il est censé renforcer.

Les steppes appartiennent aux écosystèmes  arides , avec des prairies rases et une faune spécifique (ibis chauve, hyène rayée,…) , rendant les mêmes services écologiques (absorption des gaz de serre, captage d’eau, neutralisation d’érosion,…) que les autres milieux naturels, sans nécessiter le moindre arbre.

D’une manière plus générale, planter des arbres n’importe où est contre productif quant à la lutte contre le réchauffement global.

Et l’on retrouve ici  le pouvoir de l’albédo déjà évoqué ci-dessus.

En effet, dans les zones tropicales, les couleurs plus claires des feuillages fait absorber moins de rayonnement solaire aux arbres qui, par conséquent, emmagasinent aussi moins de chaleur solaire : leur absorption de co2 est alors supérieure à celle de la chaleur solaire, et des reforestations de zones tropicales sont de pertinents recours.

Mais dans les zones tempérées et froides, c’est l’inverse : les couleurs plus sombres des feuillages font que les arbres absorbent davantage de chaleur solaire qui stagne à la surface de la terre et qui surpasse alors  leur absorption de co2 : si les croissances des forêts persistaient dans ces zones, cela se traduirait par 5 degrés de plus dans l’atmosphère d’ici 2100.

C’est pourquoi, en dehors des zones tropicales, il vaut mieux privilégier d’autres milieux naturels que les forêts, davantage prétextes à une sylviculture intensive d’essences semblables qu’à un maintien d’une réelle biodiversité.

Conserver la nature telle que la mémoire humaine l’a toujours connue est un autre bon exemple de ferveur déplacée.

En ce sens, la lutte obsessionnelle contre les espèces animales et végétales présentées comme « invasives » s’apparente à un anachronisme.

En effet, bon nombre d’observations de terrain ont portant montré trois conséquences heureuses de ces « invasions » :

- soit les espèces nouvellement arrivées coexistent avec celles traditionnellement présentes, par exemple en leur offrant de nouvelles sources de nourriture ;

- soit elles rendent les mêmes services écologiques que celles qu’elles ont supplantées ;

- soit elles sont créatrices de nouveaux écosystèmes tout aussi aptes que les anciens à résoudre les problèmes environnementaux.

C’est ainsi que la nature a toujours fonctionné : tout espèce présente quelque part depuis longtemps y  a été forcément à un moment une espèce « invasive ».

 

Sources :

- Researchers  devise hidden dune filters to treat coastal stormwater runoff, Phys., 19.03.2013.

- Pavements designed to fight climate change could increase energy consumption in surrounding buildings, Phys., 08.11.2012.

- Manmade marshes poorer in plant life that naturals one, Phys., 20.09.2012.

- White roofs can combat urban heat islands, but not without impact on regional hydroclimate, Environmental Research Letters, 09.2012 ; traduit en Français sur Science Daily. com, 07. idem.

- Bat bridges don’t work, Phys., 13.06.2012.

- Restored wetlands rarely equal conditions of originals, Phys., 24.01.2012.

- Urban “heat islands” is a small part of global warning : white roofs don’t reduce it, Phys., 19.10.2011.

- The perils of tree planting in Turkey, Treehugger, 05.02.2011.

- Peat bog restauration methods may harm insect species, Phys., 09.06.2010.

- Plant a tree and save the earth ?; Phys., 13.12.2006.

Castors, mécanos de la nature

Depuis environ 12 millions d’années, les castors fournissent des services en tout genre à la nature.

Bien connus sont ceux ayant trait à une plus grande disponibilité de l’eau.

Leurs barrages favorisent en effet une meilleure recharge des nappes phréatiques là où ils sont présents, par exemple en faisant monter les niveaux des eaux souterraines dans les fonds des vallées situés en aval.

De même, leurs barrages conservent-ils l’eau pendant les sécheresses : 60 % de plus qu’en des lieux dont les castors sont absents .

Moins connues sont les facilitations des vies de nombreuses espèces animales résultant de leurs activités.

Ainsi, les naissances et développements de populations amphibiennes sont-ils encouragés par les eaux plus chaudes et mieux oxygénées de leurs retenues, d’autant que les tailles souvent modestes de leurs barrages découragent davantage les prédateurs.

Leurs ouvrages provoquent aussi des dégels plus rapides (par exemple 11 jours plus tôt dans le centre de l’Alberta, au Canada), permettant de ce fait aux coyotes, belettes, renards, orignaux, etc… de s’abreuver plus précocément.

Cette précocité de dégel profite également aux bernaches qui avancent leurs nidifications, offrant ainsi à leurs jeunes oies du temps supplémentaire afin qu’elles se préparent à migrer avec leurs parents à l’automne.

La totalité des cours d’eau douce planétaire subissent actuellement une augmentation de leurs teneurs en sel issue des activités humaines : extractions minières échevelées, (notamment, mais pas seulement celles de la potasse), pratiques agricoles inopportunes, procédés douteux de décalcification d’eau, etc…

En conséquence, les castors s’habituent à résider en permanence dans des eaux saumâtres, par exemple dans des deltas de l’état de Washington situé au nord-ouest des U.S.A.

Ce faisant, ils contribuent aussi à y multiplier les populations de saumons sauvages : ils sont en effet 5 fois plus nombreux dans leurs retenues que dans les plans d’eau dépourvus de leurs barrages.

Pour constituer ces derniers, les castors éclaircissent les forêts, au profit des chauves-souris.

En effet, les systèmes d’echolocalisation qu’elles utilisent afin de repérer leurs proies émettent des ondes qui rebondissent sur les arbres, créant ainsi des interférences qui gênent leurs chasses, alors que lorsqu’il y a moins d’arbres, il y a également  moins de rebondissements et d’interférences, et davantage d’insectes capturés.

Cet éclaircissement de forêts a dû être particulièrement intense là où se trouve le seul ouvrage du règne animal visible depuis l’espace.

Au Canada, dans la province d’Alberta, un barrage de castors, long de 2790 mètres, continue d’être prolongé par eux : l’herbe qui pousse dessus montre qu’ils l’ont commencé autour de l’année 1970.

Constants castors.

 

Sources

- Busy beavers give Canada geese a lift, Physorg, 13.02.2013.

- Salinisation of rivers : a global environmental problem, Physorg, 11.01.2013.

- European beavers build better bat habitats, Treehugger, 20.02.2011.

- Massive beaver dam visible from space, ID, 05.05.2010.

- Beavers building prime salmon habitat in Skagit delta, Physorg, 24.05.2009.

- Beaver population helps battle drought, Physorg, 20.02.2008.

- Beavers and their dams may help amphibians, Physorg, 12.01.2007.

- Downstream ecosystems aided by beaver dams, Physorg, 05.06.2006.

 

JEAN-LUC MENARD